Un Christophe Clivaz peut en cacher un autre (Noms communs 3/5) Inutile de leur demander si quelqu'un les a déjà confondus. Quand le conseiller national sédunois vient rencontrer son homonyme, ce dernier lui transmet le courrier. Un office du tourisme du Haut-Valais a, en effet, écrit au premier à l'adresse du second: "Herr Christoph Clivaz, Nationalrat, Place de la Poste, 1986 Arolla". Curieuse erreur puisque tout l'espace médiatique réservé aux Christophe Clivaz est occupé par le docteur en administration publique, professeur de géographie et de durabilité à l'Université de Lausanne, ancien député et ancien conseiller communal à Sion, aujourd'hui élu fédéral, alors que son double est l'épicier d'Arolla. Même s'il n'est pas que ça.. Blogueur incisif sous le pseudonyme "Arolla Bla Bla", il occupe, lui, un espace de liberté, où il s'amuse à penser à rebours des chemins tracés par le plus grand nombre. Ligne droite contre diagonale Originaire de Randogne, le conseiller national a grandi à Venthône. Son parcours ne s'est jamais éloigné d'une ligne droite, tirée en travers d'un concept a priori pas très rigolo: la chose publique: "Je me suis toujours intéressé à comprendre comment fonctionne l'Etat", se justifie-t-il face à son homonyme qui revendique une préférence pour les diagonales. Ce natif de Saint-Léonard se découvre une vocation de voyageur sous les drapeaux: "Faire des choses contre mon gré, c'est pas on truc." Il fait alors un choix radical: "J'ai tout vendu et j'ai pris plusieurs allers simples." Islande, Finlande et finalement Canada, dont il obtiendra la nationalité, il se pose et travaille dans plusieurs pays du Nord, durant six ans. "C'est sûr que dans mon parcours, je me suis moins confronté à l'altérité", commente son double académique. La colère de Marius Robyr pour les réunir Christophe Clivaz et Christophe Clivaz se côtoient peu mais se connaissent depuis environ dix ans. Ils se sont rencontrés fortuitement, à cause d'un coup de fil de Marius Robyr, commandant à l'époque de la Patrouille des glaciers. "Je me suis fait engueuler parce que j'avais ouvert un sondage pour ou contre la Patrouille en évoquant les éléments négatifs méconnus du grand public: la pollution, le bruit, les hélicoptères", rigole l'épicier d'Arolla: "Quand on parle de "l'esprit de la montagne" à propos de cette course, ça me hérisse le poil." C'est donc pour demander conseil qu'il sollicite son homonyme. "Je lui ai dit qu'il avait le droit de donner son avis", complète l'élu qui partage certaines de ces critiques: "Quand elle a lieu, je participe au Collon Trek, une course avec une dimension plus humaine et plus respectueuse des espaces qu'elle traverse." Un parti pour les rassembler Les deux Christophe Clivaz se ressemblent sur le fond, mais divergent sur la forme. Ils sont du même parti, les Verts, mais alors que le premier est plutôt de ceux qui écrivent le programme, le deuxième le vit. "Le tourisme doux? à Arolla, je le pratique au quotidien. Même si on a trois tire-fesses, les gens viennent ici pour la tranquillité", évoque l'épicier en accord avec les réflexions de son double. "Il y a ici un gros potentiel pour le côté exclusif et coupé du monde, pour la nature préservée. Comme d'autres "petites" destinations, Arolla ne doit pas miser sur de grosses infrastructures, mais sur l'accueil pour garder ces visiteurs plus d'un jour ou deux", ajoute l'élu. Des caractères pour les séparer La politique ne les a réunis que le temps de la campagne pour la constituante à laquelle était candidat le blogueur. "Je ne pourrais pas m'engager plus. ça doit être pesant d'être scruté en permanence, de faire attention à chaque adjectif, à chaque virgule. Je préfère rester à l'arrière et garder ma spontanéité", explique-t-il. Ils ne sont donc pas interchangeables. "Je pourrais tenir un blog ou écrire un livre, comme lui. Mais même si j'aime beaucoup la montagne, je suis un citadin. J'ai besoin d'avoir tous les services à proximité, de me déplacer facilement à vélo", avoue le conseiller national. Après une poignée de main chaleureuse, Christophe Clivaz retourne vers la plaine en emportant un exemplaire de "Guerres d'hiver", le livre de Christophe Clivaz: "Je te le dédicace ou je laisse vide et tu le fais toi-même?" par Alexandre Beney / photos Sacha Bittel |